Jeudi 18 juin – André Malraux avait raison. « Tout le monde a été, est ou sera gaulliste. » Sa célèbre formule, parfois attribuée au général de Gaulle lui-même, connaît une postérité remarquable au jour du 80e anniversaire de l’appel du 18 juin. Les enchères montent pour s’inscrire dans la postérité.
Emmanuel Macron et Marine Le Pen, rivaux centraux du jeu politique français, se disputent l’héritage. Le chef de l’État se rend ce jeudi au Mont Valérien puis à Londres. Marine Le Pen est allée, hier mercredi – anticipant sa visite programmée d’une journée – à l’île de Sein, haut-lieu de la France libre. Elle a été accueillie par les huées de certains îliens.
On ne décernera pas ici de brevet de gaullisme. De quel droit ? On constatera simplement que la captation d’héritage est un exercice difficile. Même si elle ne doit durer qu’un petit jour.
Gaulliste, Marine Le Pen ? Son parti, le Rassemblement national est né du Front national qui a été sous le règne de Jean-Marie Le Pen le point de cristallisation des haines recuites des partisans de l’Algérie française et le refuge de beaucoup d’anciens collaborateurs. On a le droit de vouloir changer mais ce n’est pas si facile. Le nationalisme et la patriotisme gaulliens étaient grands et ouverts sur l’Europe et le reste du monde. Celui de Marine Le Pen est un nationalisme de repli, inquiet et complotiste qui voit, un peu partout, de terribles menaces planant sur la France. Un manque de confiance criant. Ça fait une grande différence.
Gaulliste, Emmanuel Macron ? Dans ses intentions rassembleuses et dans son appel à l’unité du pays en ce moment sans doute. Il en a l’accent. Mais, depuis 2017, le discours présidentiel n’en maîtrise pas pour autant tout à fait la langue. Par l’ambition de se situer au-dessus des partis, ni de de droite ni de gauche, il reste certes quelques traces. Mais rien de profond, ni dans la manière de gouverner, ni a fortiori dans la conduite de la diplomatie qui a largement rompu avec le socle gaullien, prolongé par François Mitterrand et à certains moments par Jacques Chirac. Il a été complètement abandonné depuis…Et pas seulement par Emmanuel Macron.