Patrimoine rural

Jeudi 4 juin – Sans grandes illusions sur l’avenir des rapports parlementaires, je me suis pourtant laissé aller à regarder d’un peu plus près, grâce à une dépêche de l’AFP, celui que vient de rendre la délégation aux collectivités territoriales du Sénat sur le patrimoine rural délaissé.

C’est une alerte en lien avec la crise sanitaire que nous venons de vivre. Le président de ladite commission, Jean-Marie Bockel, explique : « Le patrimoine, ce sont des emplois locaux, non délocalisables, un enjeu de développement local et un levier d’attractivité touristique ».

Les sénateurs demandent un plus fort investissement de l’État, en aides et en compétences, pour une reprise des chantiers. Y compris pour le patrimoine religieux et notamment ces petites chapelles parfois un peu abandonnées.

Certains plaident d’ailleurs de faire du patrimoine rural une grande cause nationale. On peut douter qu’en ces temps de crise économique et de crise sociale probables, ce rapport et ces appels auront une grande postérité. Or, les urgences ne sont pas toujours celles qu’on croit.

Le patrimoine architectural est au cœur de nos identités, de nos attachements à certains lieux. La Chapelle de la Tête Ronde est un lieu marquant à Menou. Si d’aventure, nous cessions collectivement d’être attentif à la conservation de ces biens communs, ce serait un abandon en rase campagne.

Dans la liste que le sociologue Bruno Latour nous invite à dresser de ce à quoi nous tenons vraiment, n’oublions pas ces pierres vivantes. Souvent on ne les remarque plus tant elles font partie du paysage. Mais elles nous ont pourtant accompagnés parfois tout au long de notre vie.

Si nous ne faisions rien, les générations suivantes nous reprocheraient, à juste titre, de ne pas avoir su conserver ce patrimoine. Souvent modeste mais pour toujours précieux. 

Une réponse sur “Patrimoine rural”

  1. Les commissions et rapports parlementaires constitueront-ils un réel levier pour faire prendre conscience à nos édiles et à nous tous, de l’importance de ce patrimoine rural, voire de ce “petit” patrimoine rural ?
    Voici quelques décennies, les puits, très nombreux à Menou, avaient bénéficié d’une réfection (me semble-t-il sous le mandat de Dominique Roger), permettant ainsi de les (re)valoriser. Ils avaient fière allure, d’autant qu’un liseré de sable mettait en valeur leur beauté. Actuellement, si ces puits jouxtent des propriétés privées, ôter le lierre, la mousse, gérer la prolifération de l’invasive potentille, etc) passe, souvent, par les voisins dudit puits, voisins attristés par la vue de ce patrimoine devenu non indispensable à l’heure de l’eau courante donc délaissé… Avec des périodes récurrentes de sécheresse estivale, ces puits sont une ressource inestimable et méritent l’attention de tous.
    Autre constat : depuis des décennies, je chérissais un magnifique caniveau empierré qui courait tout le long de la route, devant le 6, Chemin des Ecourieux, le désherbant manuellement, tous les printemps. L’ajustement de chaque pierre, polie par les ans et les affres du temps, était merveille. Voici une dizaine d’années (hiver 2009-2010, à vérifier !), des travaux de réfection du réseau d’eau mit à mal à tout jamais ce bel exemple de “petit” patrimoine rural qui disparut corps et âme sous les griffes d’une pelle mécanique et ses pierres furent transportées par un camion. Désormais, quand il pleut, l’eau peine à s’écouler et stagne, faisant les délices des moustiques…
    Le mur, qui courait le long des terres du château, a disparu, la main d’oeuvre se faisant rare et onéreuse. Il reste pour moi la trace du travail de nos ancêtres, contraints de donner des jours de corvées à leur seigneur, pour le construire, puis pour l’entretenir.
    Autre remarque au sujet des haies vives, signature de nos paysages ruraux nivernais, dans la partie orientale. Celles-ci sont désormais massacrées par des engins, conduits par des hommes pressés, peu enclins à la demi-mesure… Déchiquetés, les arbustes prennent des postures dignes de grotesques gargouilles hurlant sous la douleur. Voici quelques décennies, les cisailles, moins intrusives, leur donnaient fière allure. En outre, au nom de la sainte productivité, bon nombre de ces haies ont été arrachées, laissant déferler des bourrasques impétueuses, ravies de s’en donner à coeur joie sur ces boulevards ouverts à… tout vent. Les tempêtes sont de plus en plus nombreuses et ravageuses, l’érosion éolienne s’en trouve accrue. L’UE a distribué des subventions pour arracher les haies, elle en donne maintenant pour les… replanter.
    Rien ne sert de pleurer ou de s’attrister, il est nécessaire de prendre conscience ou/et de faire prendre conscience à tout un chacun que ce patrimoine rural représente en amont un travail pensé, chéri, qui permet à la France, d’offrir, à nos yeux émerveillés et à ceux des touristes, des trésors inestimables. Je ferai ici, référence à Jean-Robert Pitte, géographe, qui, dans “Histoire du paysage français” (1983, réédité plusieurs fois, la dernière datant de 2011), montre combien ce patrimoine rural constitue une richesse et un attrait formidables. Ouvrons les yeux, entretenons et contemplons ce magnifique patrimoine rural, si anodin puisse-t-il paraître.

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